Semaine de la diplomatie : 24 - 28 avril 2023. Pour consulter le programme, cliquez ici : link

Image : Pixabay

 

Diplomatie US

Joe Biden, 78 ans, a pris ses fonctions le 20 janvier dernier en tant que Président des Etats-Unis d’Amérique, et il devrait impulser un nouveau souffle dans les relations internationales de Washington et du reste du monde. C’est l’antagonisme avec son prédécesseur, Donald Trump, qui laisse penser cela, mais quelles ambitions se cachent dernière ces volontés ?

Biden est un acteur de longue date de la politique états-unienne au Moyen-Orient. La structure actuelle de quelques Etats dont l’Irak et la Syrie constituent son héritage.

Un acteur de longue date 

Le locataire de la maison blanche est dans les affaires publiques de son pays depuis une cinquantaine d’années. Sénateur de l’Etat du Delaware depuis 1973, il préside la commission des affaires étrangères du Sénat au moment du conflit naissant entre les Etats-Unis et l’Irak. A l’été 2002, il relaie la propagande de l’administration Bush, pourtant du parti opposé.

En ce qui concerne les « armes de destructions massives » que détiendrait l’Irak : Biden dit « Saddam Hussein doit abandonner ces armes ou il doit abandonner le pouvoir ». Il fera même campagne contre les opposants à l’invasion du pays, dont les français, qu’il traitera de « a pain in the you-know-what ». Pour finalement, réécrire son histoire en 2004, soutenant qu’il était contre une invasion.  

La vision de l’Irak de Biden est définie par des critères confessionnels sans prise en compte du sentiment national irakien ni des conséquences pour le reste du Moyen-Orient d’un éclatement du pays. Il y a une sympathie historique de Biden pour les kurdes irakiens et syriens. Il avait même proposé une partition de l’Irak en trois parties avec une composante kurde, sunnite et chiite. 

Poursuivre l’héritage d’Obama 

En matière d’Affaires internationales, l’action du Président Obama avait été de se désengager du Moyen-Orient pour se tourner vers l’extrême orient, notamment la Chine.  

En Syrie par exemple, le vice-président Biden est partisan de ne pas s’engager davantage. Il ne croit pas à une transition démocratique dans le pays, si bien qu’il dit en 2014 : « Je n’ai pas encore trouvé de Thomas Jefferson caché derrière une dune en Syrie ». En plus d’être culturaliste, cet argument est déterministe (définir un pays selon une culture associée ou une essence), montrant qu’il ne croit pas en une transition démocratique avec le Régime de Bachar-Al-Assad qu’il rejette. 

En Turquie, Obama était apprécié par l’exécutif Turc, mais a son départ, il a laissé des relations tendues avec Ankara. Biden, qui était le vice-président d’Obama a qualifié Erdogan d’autocrate et affirmait qu’il soutiendrait l’opposition turque, ce qui n’est pas du goût d’Ankara. 

Joe Biden devrait incarner une doctrine de restauration. Restauration de l’image de sa nation à l’étranger, renouer avec le « deep state ». Il va adopter le pragmatisme, comme Obama l’avait fait. Le but étant de passer de la « domination à la dominance » selon Hicham Alaoui -chercheur Associé aux Weatherhead Center for International Affairs de l’Université Harvard-.

Obama s’est désengagé du Moyen-Orient pour pivoter vers l’Asie dont la Chine, centre des préoccupations de sa politique étrangère. Biden suivra ses pas, sachant que son prédécesseur a laissé des relations tendues avec la guerre commerciale contre l’Empire du Milieu. 

Tourner le dos à l’héritage Trump 

Concernant le dossier brulant du Moyen Orient, l’accord rompu sur le nucléaire iranien par le Président sortant, Biden stoppera le push agressif de son prédécesseur. Cela, pour revenir aux discussions sur le programme balistique, dont se sert la République Islamique comme monnaie d’échange pour promouvoir son économie extérieure. Il faut rappeler, qu’Obama a eu lui aussi une expérience défavorable avec l’Iran, il est le Président qui a le plus sanctionné le pays, avant Trump. Il parle dans ses mémoires Une terre promise du « doigt d’honneur » que lui avait adressé le guide Suprême dans une lettre en 2009. 

Le « Building on » de Trump, c’est-à-dire la politique de pression maximale qu’il a exercé, va tout de même faciliter les négociations pour Biden et ses diplomates et devrait les faire avancer. Le but étant aussi de restreindre la poussée de l’influence iranienne dans l’arc levantin. 

Concernant la régulation des conflits armés et le plaidoyer en faveur des droits humains dont les Etats-Unis se font le porte-drapeau, durant la présidence Biden, ils devraient réfléchir à deux fois avant d’intervenir sur le terrain, préférant se coordonner avec leurs alliés locaux, intermédiaires essentiels.

Ils resteront un « phare » dans la démocratisation au Moyen-Orient mais ce ne sera sans doute plus à eux de fixer les règles des droits humains. S’il y a une mobilisation médiatique de la rue arabe, alors à ce moment-là, ils pourraient réagir. Le but serait de ne pas résoudre les conflits mais de les éteindre. 

Une des priorités de l’administration Biden sera de restaurer le standing du pays à l’international, fâché avec les alliés européens et en guerre économique avec la Chine, diplomatique avec l’Iran ou encore le Venezuela. Il n’y aura pas de repli unilatéral. Il faut rappeler que Trump n’a jamais fait de visite/voyage officiel dans un pays africain et selon des journalistes états-uniens, il aurait traité, en discutant des politiques migratoires de son pays, une lignée de pays africains et latino-américains de « shit hole » : « Why are we having all these people from shithole countries come here? ». 

Joe Biden devrait se montrer pragmatique au Moyen-Orient et on doit s’attendre de lui qu’il marche dans les pas d’Obama et plus étonnement encore, suivre ceux de son prédécesseur. La vision états-unienne étant d’avantage centrée sur l’Asie, il est à prévoir un désengagement sans doute du Moyen-Orient mais une continuation de l’ambition d’être le gardien de la paix dans la région. Il aura aussi pour objectif de continuer à faciliter les relations des pays de la région avec Israël. Concernant les principaux intéressés, ils n’ont pas besoin d’une puissance impérialiste pour s’entendre entre voisins et des pays comme l’Iran ou la Syrie montrent qu’ils ont des alliances fortes pour tenir tête au nouveau président des Etats-Unis. 

 

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et n’engagent pas la Swiss Diplomacy Student Association

 

Sources : 

Le Monde https://www.lemonde.fr/blog/filiu/2020/11/22/retour-sur-quinze-annees-derreurs-de-biden-en-irak/

L’Express https://www.lexpress.fr/actualite/monde/amerique-nord/joe-biden-un-diplomate-chevronne-a-l-elysee_1216561.html

The Wall Street Journal https://www.wsj.com/articles/bidens-apology-tour-1412636332

Conférence de l’Université de Genève https://www.unige.ch/gsi/fr/actualites/2020/le-moyen-orient-selon-joe-biden-webinaire-14-dec-2020/

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *